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Celle dont j'ai toujours rêvé ~ Meredith Russo

  • Photo du rédacteur: Ma Pause Evasion
    Ma Pause Evasion
  • 19 déc. 2021
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 7 mai 2022

*Éditions Pocket Jeunesse*


C’est un tourbillon d’émotions que je me suis pris en pleine face en lisant cette histoire.

Une histoire peu commune, que l’on retrouve rarement en littérature jeunesse. Une histoire unique nous amenant à réfléchir sur soi-même, sur les autres, à se questionner et se trouver. Une histoire qui aborde tous les sujets tabous, enfouis ou dissimulés dans la plupart des textes littéraires.


Ce livre, écrit par l’autrice Meredith Russo et publié chez Pocket Jeunesse, raconte l’histoire d’Amanda, une femme transgenre. Avant, elle s’appelait Andrew.

Andrew n’était pas un garçon comme les autres. Il se sentait mal dans son corps et dans son esprit, puisque les deux doivent trouver un équilibre. Andrew n’aimait pas le sport. Il n’aimait pas se battre. Il ne voulait pas avoir de poils sur le torse ou muer au cours de l’adolescence. Andrew était dégoûté par toute cette masculinité en lui, qui ne lui correspondait pas. Ce n’était pas lui. En allant voir son thérapeute, Andrew lui explique comment il se sent depuis tout petit : “Mais je me sens mal en tant que garçon. J’aime quand je laisse mes cheveux pousser et que les gens me prennent pour une fille. J’essaie d’imaginer quel type d’homme je deviendrai et rien ne vient. Même si c’est avec un homme, me voir en tant que mari ou père me donne l’impression de disparaître dans un trou noir. Le seul avenir dans lequel j'existe, c’est celui où je suis une fille.” p. 39-40.

Andrew désirait du plus profond de son être devenir une fille. Il voulait s’habiller et se maquiller comme une fille, adopter le comportement d’une fille. Pour lui, la nature s’était trompée à sa naissance. Il aurait dû naître avec un sexe féminin et non masculin. Il voyait son corps comme “[...] cette prison ambulante, qui me forçait à le garder en vie depuis quinze ans.” p.274.

Dans cette histoire, le traitement que doit prendre le personnage n’est pas décrit dans tous les détails. Nous savons seulement qu’il a pris des pilules pour avoir des hormones féminines et qu’il a consulté plusieurs professionnels de santé afin d’être correctement suivi et diagnostiqué. L’autrice a volontairement souhaité romancer son histoire, dans le but de ne pas perdre ses lecteurs et de cibler un jeune public pour leur faire comprendre les bases du sujet.

Andrew réussit à devenir une fille et s’appelle ensuite Amanda. C’est elle que l’on suit au cours de l’histoire. Elle arrive dans un nouveau lycée et emménage chez son père, qui a toujours eu honte d’avoir un garçon manqué. Elle se fait des amis, sort avec un garçon et essaye de profiter de ces moments de bonheur inespérés, malgré le secret qui la pèse tous les jours. Son passé lourd et difficile l'oppresse et la rend méfiante. Elle souhaite de tout cœur que les gens de cette ville qu’elle ne connait pas soient bienveillants envers elle, mais elle craint de leur dévoiler son ancienne identité. Finalement, elle le révèle à une fille qu’elle considérait comme une amie, mais qui le répète à tout le monde lors d’une fête au lycée. Amanda est dévastée et retourne vivre chez sa mère, de peur d’être à nouveau harcelée et non acceptée par ses nouveaux amis.


Ce qui m’a beaucoup plu dans le livre de Meredith Russo, c’est le fait qu’elle parle des diverses sexualités qui existent, bien qu’elles ne soient pas vraiment détaillées. Elle aborde l’homosexualité, du côté féminin comme masculin, la bisexualité, l’asexualité, la non-binarité et la transsexualité. Elle parle aussi de la communauté LGBT (Lesbienne, Gay, Bisexuel, Transgenre), même si aujourd’hui, elle est appelée LGBTQ +, afin d’inclure toutes les sexualités qui existent.

De plus, l’autrice a dévoilé deux aspects que j’ai trouvé vraiment intéressants et pédagogues pour les enfants ou adolescents qui lisent son livre. C’est le consentement et le harcèlement envers les personnes non hétérosexuelles ou cisgenres (= personne qui est en phase avec son sexe de naissance).

Le harcèlement est très bien abordé, car dans les différents passages où l’autrice nous fait revenir dans le passé d’Amanda, on comprend qu’elle a vécu des choses terribles par ses camarades d’école. Elle n’avait pas sa place, beaucoup de garçons se moquaient d’elle, alors qu’elle était encore un garçon à ce moment-là. “[...] à leur passage ils me donnaient des coups de pied dans les jambes et faisaient tomber ce que je tenais.” p. 272. C’était tellement difficile pour elle de supporter toute cette haine et l’intolérance des autres qu’elle a fait une tentative de suicide, comme beaucoup d’autres dans son cas.

Après tous ces épisodes durant son adolescence, Amanda revit lorsqu’elle arrive chez son père et qu’elle apprend à connaître de nouvelles personnes.

Cependant, lorsque tous ses amis apprennent qu’elle est transgenre, Amanda s’enfuit de la fête. Un garçon la rattrape et se met à la harceler avec toute la méchanceté dont il est capable. Il l’insulte, la frappe, tente de la violer et l’humilie par rapport au fait d’être devenue une fille : “Si t’avais voulu qu’on te laisse tranquille, tu serais restée un garçon. Si t’as changé, c’est pour attirer l’attention”. p.261.

Évidemment, bien que cette scène soit décrite de façon très violente et même choquante, l’autrice n’est volontairement pas allée jusqu’au bout pour ne pas traumatiser son public. En réalité, les personnes transgenres ne sont pas toujours sauvées par leur entourage, au contraire. Beaucoup sont rejetées par leur famille, violées, humiliées, torturées ou tuées. C’est une identité sexuelle qui est encore très difficilement acceptée dans le monde et perçue la plupart du temps comme une névrose qu’il faut soigner.


Pour la partie consentement, ça se passe surtout entre Amanda et son petit ami, Grant. Leur amour et leur relation se fortifient au fil de l’histoire. Ils ont envie l’un de l’autre, mais Amanda n’est pas encore prête à dévoiler son corps à quelqu’un d’autre. Grant comprend et respecte le fait qu’elle n’ait plus envie, même s’ils s’apprêtaient à aller plus loin : “ - Tu veux qu’on ralentisse ? - Oui, ai-je dit, reconnaissante qu’il comprenne. C’est merveilleux, mais oui. - Ce n’est pas un problème. Absolument pas.” p. 236. Ce genre de scènes est très peu raconté dans les romans jeunesse, et ça m’a surprise de constater que l’autrice a très bien décrit ce moment, montrant à son lectorat l’importance du consentement de l’autre à tout moment.


D’autres sujets sont évoqués et très bien amenés par l’autrice dans cette histoire. La religion, notamment, vis-à-vis des personnes non hétérosexuelles. Lorsqu’elle déménage, Amanda rencontre Anna, une amie qui vient d’une famille très chrétienne. Celle-ci lui propose de l’emmener à la messe, et Amanda découvre alors la façon de penser dans sa religion et sa famille par rapport aux gens comme elle : “Ce n’est pas ma faute si je suis homophobe… je suis né ainsi !” p. 95.

Aujourd’hui encore, la religion n’accepte ni ne tolère les personnes transgenres, homosexuelles ou ayant une autre sexualité que celle d’aimer son sexe opposé. La mentalité des gens évoluent petit à petit à ce niveau-là, mais il y a encore beaucoup de chemin à faire. Au Brésil, par exemple, une personne LGBT est assassinée toutes les 25 heures et au Soudan, l’homosexualité est punie de mort. (faits tirés du livre Je suis qui ? Je suis quoi ? Éditions Casterman).


La tendresse et la sensualité sont aussi très bien présentées dans ce roman jeunesse. “Il m’a embrassé à nouveau. Je l’ai enlacé. Il a passé les doigts le long de mes côtes, [...]. Puis il est descendu sur mes hanches, et encore plus bas.” p. 235. Ces scènes-là ne sont pas toujours écrites avec les détails dans les livres destinés aux jeunes, car c’est encore tabou ou estimé comme non adapté à leur tranche d’âge. Or, c’est à l’adolescence que les jeunes lecteurs se posent des questions et qu’ils ont besoin de savoir comment fonctionne la sexualité. C’est la période durant laquelle ils s’interrogent le plus et attendent des réponses. Il est donc important de les leur donner.


Ce roman jeunesse m’a vraiment chamboulée, de part la force du sujet abordé, les mots précis et touchants de l’autrice ou encore les passages profonds, émotionnellement parlant.

Les personnages sont très attachants et ont tous leur sensibilité, leurs problèmes et leurs questionnements. Je trouve que cette histoire est d’abord destinée aux jeunes et aux adolescents qui se questionnent, qui cherchent leur identité ou leur sexualité et qui n’en savent pas trop sur le sujet. Mais elle est aussi très appropriée pour un lectorat plus vieux, ou plus jeune, pour les enfants qui se posent rapidement ce genre de questions. Il me paraît nécessaire et important que chacun puisse en apprendre plus sur ces sujets et avoir cette ouverture d’esprit, ce respect pour ces personnes qui ne sont pas plus différentes que les autres. Elles sont uniques, comme chaque être humain sur Terre.


C’est le message que fait passer Meredith Russo, d’apprendre à se respecter et s’aimer soi, en premier lieu. Cesser de s’excuser d’exister ou de se cacher, mais plutôt d’assumer qui nous sommes. En second lieu, apprendre à vivre en communauté et trouver sa place, parce qu’il y en a toujours une pour chaque personne dans le monde. Comme l’écrit l’autrice elle-même dans son roman, les transgenres ou tout autre être humain non hétérosexuel, ne sont pas seuls. Ils ne sont pas bizarres ou malades. Ils sont normaux, uniques et beaux. Mais c’est un message qui n’est pas reçu correctement dans toutes les mentalités, bien qu’elles changent au fil du temps.


En conclusion, j’ai vraiment aimé lire ce roman. J’ai pris beaucoup de plaisir durant ma lecture à découvrir cette histoire particulière et touchante.

C’est un coup de cœur pour moi et je le conseille vivement aux adolescents concernés par le sujet ou en interrogation. En somme, un beau récit à découvrir !


****/5


@Ma.Pause.Evasion

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